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Dépression : Troubles de l'esprit
ou troubles du cerveau ?



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Comme chacun(e) le sait et comme beaucoup d'auteurs le montrent dans d'innombrables études de cas, des évènements d'origine extérieure - sociale notamment -  sont souvent à l'origine de déprimes ou de dépressions, ou en sont des déclencheurs.
La "constitution biologique" de chacun(e) n'a rien à voir avec ce fait massif, alors même que des variations sont observables d'une personne à l'autre.

La causalité psychologique explique par ailleurs pourquoi, en cas de déprime ou de dépression, changer sa façon de voir les choses est fréquemment un objectif à atteindre, voire la seule solution aux difficultés ou problèmes rencontrés, ceci pouvant engendrer des changements de conditions de vie et/ou d'environnement, le cas échéant.

Autrement dit, c'est un fait avéré que des modifications du fonctionnement psychique accompagnées ou non de changements dans les modes de vie, peuvent résoudre beaucoup de problèmes.

Les changements importants passent souvent par un travail sur soi permettant des prises de conscience et de décisions appropriées, ceci étant un des buts et des effets principaux des psychothérapies.

Précisons ici que déprime et dépression sont des états différenciés à ne pas confondre, malgré la proximité des termes.
 
Une déprime est une baisse de moral passagère sans conséquence sérieuse pour la personne concernée, tandis que dans une dépression, cette baisse de moral est installée dans le temps et s'accompagne d'un ralentissement psychique, d'une baisse d'activité et d'une perte de motivation, en particulier.

Il faut donc distinguer des états temporaires engendrés par des causes fortuites ou éphémères, et des états de souffrance installée durablement, autrement dit des tableaux cliniques réunissant l'ensemble des symptômes constituant une pathologie connue.
On comprendra aussi que négligée ou mal soignée, une déprime peut éventuellement se transformer en dépression, si elle se répète ou se prolonge excessivement.

En tout état de cause, des études montrent que dans les états normaux, le rapport entre pensées négatives et pensées positives est de 25% vs 75% en moyenne, et qu'il est inversé dans les états dépressifs.
Ces pourcentages sont des bons indicateurs pour l'évaluation de ces états et surtout ils révèlent clairement l'importance du mal-être et de la souffrance psychique, c'est-à-dire morale, dans les états de dépression et de déprime par extension.
Invariablement, en effet, une personne déprimée a tendance à se faire du mauvais sang ou à voir tout en noir comme disent les expressions populaires, ces symptômes devant faire suspecter une déprime ou un état dépressif plus ou moins sévère, selon la durée et le degré de bouleversement du rapport au objets de la conscience.

Un deuil, une maltraitance physique ou psychologique, une mésentente familiale ou conjugale, des difficultés professionnelles, un stress excessif, etc., beaucoup d'évènements négatifs et/ou de difficultés relationnelles sont susceptibles d'impacter plus ou moins lourdement et durablement le moral d'une personne et ainsi engendrer des états allant de la déprime à la dépression.
Dans les cas d'évènements extérieurs et indépendants des personnes concernées, on parle d'états dépressifs d'origine exogène.

A cet égard, il faut toutefois préciser que certains faits sont indépendants des personnes qui les vivent.
Autrement dit l'existence d'un déterminisme intrapsychique n'annule ou n'abolit pas celle de déterminismes extérieurs aux personnes concernées.
Ce point est très important car de nombreuses personnes et certains professionnels également ne sont pas conscients de cela et ramènent toujours tout à la seule personnalité des sujets en souffrance et à leur conscience.

En outre, le fait que certains évènements nous affectent psychologiquement et émotionnellement, ne suffit pas pour dire qu'ils engendrent ou révèlent un trouble du cerveau, notamment parce qu'il faudrait connaitre très précisément la nature de ce trouble et des remèdes à lui apporter, ce qui est souvent loin d'être le cas malgré les nombreuses connaissances existant sur ces sujets.

En effet, en médecine et plus encore en psychopathologie, malgré tous les efforts d'harmonisation scientifique et culturelle provenant des USA notamment (cf l'Evidence Based Medicin, les DSM etc.), il n'est pas rare qu'une même pathologie fasse l'objet de thèses et d'hypothèses différentes, et par conséquent de traitements différents, que ce soit au sein d'une même spécialité ou des différentes branches d'une discipline, et que ce soit simultanément ou successivement.
De fait et en outre, la pluralité des courants et des écoles de pensée atteste à elle seule de l'éclatement des disciplines en multiples spécialités.
On comprend ainsi que malgré les apparences et malgré toutes les précautions dont elle s'entoure, la médecine n'est pas une science exacte au sens que ce terme devrait avoir, mais bien une science humaine et sociale (Pr Philippe Even).

Inversement à ce qui précède, d'autres états de déprime ou de dépression sont reconnus comme étant d'origine endogène.
Un régime alimentaire inadapté (sous-nutrition ou malnutrition), une souffrance somatique, des substances toxiques (alcool, haschich, neuroleptiques, benzodiazépines, etc), peuvent avoir et ont souvent des effets dépressogènes directs ou indirects (en induisant une baisse du niveau d'énergie, des carences vitaminiques, des crises d'angoisse en diminuant la production de dopamine, etc...).
De même certains mécanismes de défense ou certaines distorsions cognitives, c-à-d certains types de raisonnements déterminant des modes de fonctionnement psychique, sont connus comme étant pathogènes pour une personne, que ce soit dans ses rapports avec elle-même, avec autrui ou avec la réalité extérieure.

Enfin, ceci compliquant encore un peu plus les choses, certains états peuvent combiner des facteurs d'origine endogène (intérieure) et exogène (extérieure).

On entrevoit ainsi que les causes de déprime ou de dépression sont multiples et complexes. Raison pour laquelle les traitements de ces états, lorsqu'ils sont nécessaires, sont eux-mêmes diversifiés.
Le développement de la recherche psychopathologie a logiquement abouti à la mise au point de nombreux traitements, tant biologiques que psychologiques.

Les psychothérapies en particulier, se sont fortement développées dans le sillage de la psychanalyse, et de la rupture instituée par le paradigme du psychisme avec les sciences de la nature.
Pour ces raisons évoquées plus longuement ailleurs, les psychothérapies ne sont pas des traitements biologiques, et de même, de simples entretiens informatifs ou explicatifs ne sont pas des psychothérapies.

C'est aussi pourquoi, paradoxalement, psychiatres et psychothérapeutes n'exercent pas le même métier la plupart du temps, sauf dans les rares cas où les psychiatres ont complété leur formation de médecin par une formation de psychologue, de psychothérapeute ou de psychanalyste notamment.
 
Autrement dit, de fait, la psychopathologie a toujours été écartelée entre les thèses biologiques et les thèses psychologiques (dont la psychanalyse), et le clivage entre pathologies mentales et pathologies psychiques, autrement dit entre pathologies neurologiques et pathologies psychiques n'a jamais été totalement élucidé, de sorte que l'on rencontre plus souvent des amalgames douteux que des explications éclairantes sur ces questions.

En tout état de cause, pragmatiquement, le principe de précaution voudrait que l'on n'emploie jamais des traitements potentiellement lourds (ayant des effets secondaires indésirables ou délétères) sans avoir essayé préalablement des traitements plus soft ou légers (du type psychothérapies et médecines douces en particulier).

Or, ce n'est souvent pas le cas en psychiatrie biologique. En effet, concrètement, les psychiatres naturopathes, homéopathes, phénoménologues, psychanalystes, etc., ou ayant une formation spécifique en psychothérapie, sont minoritairres, et la médecine allopathique traditionnelle a toujours eu la haute main sur la psychiatrie.
L'immense majorité des molécules utilisées sont ainsi des molécules de synthèse ayant des effets secondaires imprévisibles et parfois délétères, voire irréversibles, même si elles ont aussi des effets positifs sur les symptomes.

Autrement dit, la balance bénéfices-risques de ces molécules, bien que leur étant favorable statistiquement et permettant la délivrance d'AMM, est au cas par cas souvent source de problèmes et de difficultés pour les patients.

D'autres molécules provenant de la phytothérapie, de la naturopathie ou de la médecine orthomoléculaire - donc de médecines écologiques - sont peu commercialisées car non brevetables, c-à-d peu ou pas lucratives pour les laboratoires dominant la recherche et le domaine des prescriptions, avec d'énormes moyens allant de l'emploi de nombreux visiteurs médicaux à l'organisation de congrès, en passant par le financement de thèses de médecins et bien d'autres incitations. (1)

Malgré tout ou bien à cause de cela, les pouvoirs publics ont toujours favorisé les traitements allopathiques classiques pour des raisons politiques et de coût, en particulier, alors même qu'à terme, ces traitements s'avèrent beaucoup plus onéreux humainement et économiquement que les autres, sans parler des nuisances environnementales engendrées par certains produits (problèmes de biodégradabilité).

Quoi qu'il en soit, en outre, si beaucoup d'études ont mis en évidence l'action de nombreuses substances sur la conscience, cela ne va pas sans soulever d'épineuses questions, pour qui veut tenter d'être objectif ou neutre.
Par exemple, les neuroleptiques ont été découverts fortuitement et l'action de la chlorpromazine - le premeir d'entre eux - a été interprétée comme témoignant d'un excès de dopaminergie dans le système nerveux central.
Concrètement, les chercheurs sont partis des effets de la chlorpromazine - sédation des délires par blocage des récepteurs dopaminergiques - pour conclure que ces états sont dus à un excès de dopamine. Raisonnement pour le moins contestable comme le remarque fort justement D. Widlöcher dans un ouvrage, sans que cela ait le moindre impact sur la croyance dans la thèse en question, ou du moins sur son approbation par le corps médical, et sur la commercialisation massive de cette molécule.
La notion de service médical rendu (SMR) par un produit - ici la sédation des délires - peut ainsi passer avant le souci de vérité scientifique, à proprement parler.

En tout état de caurse, si on peut comprendre le raisonnement et la position en découlant, les choses deviennent plus compliquées quand des anti-psychotiques sont prescrits à des personnes ne présentant pas d'éléments délirants, ou quand on découvre dans des sources sûres que pour les mêmes pathologies, les doses et les durées de prescription varient de 1 à 10, voire au delà.

Quoi qu'il en soit, y compris en amont des prescriptions, tout se passe parfois de manière contestable dans les protocoles expérimentaux, la quête de "succès" et de récompenses semblant primer sur les considérations éthiques, en particulier.
On part donc par exemple ainsi d'un effet ou d'un mécanisme observé pour en déduire une cause ou un enchainement logique,
et on laisse ainsi de côté des variables non contrôlées potentiellement autant voire plus déterminantes que les variables contrôlées.
Ceci explique aussi la présence de plusieurs thèses, et produits ou services correspondant à ces thèses, parmi lesquels le praticien concerné est de fait amené à choisir en fonction de sa formation et de son information.

Il en va ainsi dans les sciences comme dans la parabole du réverbère, où un passant cherche ses clés uniquement dans la zone éclairée.

S'agissant de la dépression, en médecine, cette zone éclairée va des omégas 3 à la sérotonine (ou son précurseur le 5-HTP contenu dans le Griffonia par exemple), en passant par le millepertuis (antidépresseur naturel très utilisé en Allemagne) et d'autres produits homéopathiques, naturopathiques, phytothérapeutiques, etc. Il y a aussi des médecines manuelles comme l'acupuncture, par exemple. (2)

Par ailleurs, quand les gènes sont suspectés ou directement incriminés, les acteurs oublient souvent que ceux-ci subissent les influences de l'environnement au niveau du phénotype, c-à-d de leur expression. (3)
Les psychothérapies des états dépressifs agiraient elles-mêmes au niveau phénotypique des gènes.
Cela dit, en outre, la question de savoir ce qui est premier, de la protéine ou du gène, semble cruciale également même si elle est indécidable, à l'instar de celle de la poule et de l'œuf.
C'est encore dire la complexité et l'ambigüité des faits pour leur bonne compréhension, donc les interprétations diverses pouvant être faites et l'étant.

En tout état de cause, quel que soit le mode d'expression biologique réelle ou supposée d'une déprime ou d'une dépression, le bon sens et le principe de précaution voudraient qu'on cherche prioritairement à examiner et à traiter le fonctionnement psychique d'un(e) patient(e), et notamment ses conditions de vie ou d'environnement, afin d'aller dans le sens d'un meilleur confort, hygiène et qualité de vie pour lui (elle).
En effet, l'approche psychologique devrait être première car à la fois plus naturelle, plus sûre et finalement plus pertinente qu' un traitement biologique ou médical.

C'est aussi le plein sens d'une approche écologique de l'esprit, incluant une prise en compte de l'environnement et du contexte personnel de chacun(e).
De ce point de vue encore, force est de constater que réduire les troubles dépressifs à une panne dans le moteur (E. Roudinesco) comme c'est souvent le cas en psychiatrie, ressemble fort à une imposture.

Autrement dit, dans de nombreux états dépressifs et anxieux, pour reprendre la catégorisation générique, la seule chose sure car manifeste, c'est qu'il s'agit de troubles de l'esprit devant pour cette raison, bénéficier prioritairement de traitements psychologiques , les traitements biologiques n'étant indiqués qu'en seconde intention, si l'on veut respecter le bon ordre des choses et appliquer des règles de pur bon sens.

En effet, prescrire d'emblée ou uniquement un traitement biologique, sans chercher à améliorer le fonctionnement psychique et/ou les conditions de vie d'un patient, revient souvent à gommer des symptômes sans traiter leurs causes, et par là-même à pérenniser les problèmes, autrement dit à chroniciser des pathologies qui pourraient être temporaires, c-à-d aigües.

Tout cela rappelle la célèbre et fort pertinente phrase de Freud disant : "je sais que que des moyens physiques agissent sur le moral, mais ne serait-il pas plus indiqué et plus efficace d'agir sur le moral d'un sujet par des moyens moraux, c'est-à-dire psychiques ?".

Quoi qu'il en soit, quand un traitement biologique est nécessaire, il faut encore déterminer quel traitement est le plus adéquat, car la médecine n'est pas monolithique contrairement ce qui est parfois allégué ou sous-entendu.
Comme on l'a évoqué, elle est au contraire divisée en plusieurs médecines, branches et spécialités traitant les mêmes pathologies de différentes manières.

En tout état de cause, face à de supposés troubles du cerveau sur lesquels peuvent agir différents moyens thérapeutiques, il est sûr que dans le doute et compte tenu de la complexité des problèmes et des faits, il vaudrait toujours mieux s'abstenir de recourir trop vite aux grands moyens, pour le dire trivialement. (5)
Autrement dit, la prudence élémentaire exigerait notamment d'utiliser des traitements naturels non nocifs, c-à-d sans effets secondaires  - primum non nocere - ce qui malheureusement n'est pas assez souvent le cas.

Au contraire, l'insuffisante information de nombreux patients, le remboursement des consultations médicales et le monopole des prescriptions d'arrêt de travail détenu par les médecins, incitent beaucoup de personnes à s'orienter vers une prise en charge médicale alors que des soins psychologiques seraient souvent plus appropriés comme on l'a vu, tout cela expliquant  à la fois la surmédicalisation des problèmes psychologiques, la surconsommation de psychotropes, ainsi que l'aggravation des déficits de la Sécurité Sociale.


Françoise Zannier


Références bibliographiques :

Le prix du Bien-Etre - par Edouard Zarifian, Ed. O. Jacob, 1998 (<-clic)

Peut-on comparer l'industrie pharmaceutique à la mafia ? - par Richard Smith, ancien rédacteur en chef du British Medical Journal (<-clic)

Le déni du psychisme dans la psychiatrie contemporaine - par Edouard Zarifian (<-clic)

Les gènes existent-ils ? - par Jean Jacques Kupiec (<-clic)

La conscience aux confins du matériel et du spirituel - par Françoise Zannier (<-clic)

Association Nationale de Défense des Intérêts des Victimes des Accidents des Médicaments (<-clic)





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